
George et Ira Gershwin
Le Duo Iconique de Broadway

Je pense que nous avons tous plus ou moins entendu parler de Gershwin. Soit nous sommes au fait du compositeur de génie que fut George, soit notre oreille connait, sans trop savoir pourquoi, ce nom à la sonorité si étrange.
Pour cette première catégorie, navrée, nous ne développeront pas plus loin le talent de George Gershwin qui semble si évident à tous les mélomanes. En revanche nous parlerons du deuxième Gershwin, qui est en fait le premier, chronologiquement, Ira Gershwin. George et Ira Gershwin ont eu un impact non négligeable sur la scène de Broadway et c’est exactement ce dont nous allons parler. Accroche ta ceinture, lecteur, nous partons à la découverte du duo iconique de Broadway, celui des frères Gershwin !
Gershwin ? Plait-il ?
Alors déjà je me dois de te préciser qu’Ira et George ne s’appelaient pas vraiment « Ira » et « George », pas plus qu’ils ne s’appelaient « Gershwin ». Issus d’une famille d’immigrés juifs russes et étant la première génération née aux Etats Unis, leur père décida d’américaniser les prénoms de ses fils qui passèrent d’Israel et Jacob à Ira et George. De plus leur nom de famille, jusque là Gershowitz subit lui aussi la même transformation et la famille devint, la famille Gershwin.
A vrai dire, le fait d’être issu de l’immigration a pas mal influé sur la vie des enfants Gershwin (ils étaient quatre en tout). Chacun s’efforçait d’être le meilleur américain. Dans la logique de se fondre dans la masse et dans la culture locale il était primordial d’acquérir les codes sociaux de l’époque et de se hisser dans la société afin d’offrir aux parents la vie qu’ils ont rêvé et pour laquelle ils ont tout abandonné dans leur pays d’origine. C’est d’ailleurs un trait assez récurrent chez les enfants d’immigrés.
George et Ira n’ont pas ménagé leurs efforts et c’est dès l’âge de 15 ans que George se fait remarquer pour ses talents de pianiste. Il sera la star de la famille, celui qui rendra le nom célèbre dans le monde entier. Mais sa famille va rester sa priorité ! Quand George sera au top de sa carrière c’est toute la famille qui bénéficiera de son aisance financière.
Ira quand à lui n’est pas en reste. Il est un parolier de qualité. Mais dans le souci de ne pas faire de l’ombre à son frère il écrit d’abord sous le pseudonyme d’Arthur Francis. Tu vois lecteur, il n’y avait pas de rivalité entre les deux frères et chacun avait un immense respect pour l’autre. De plus, ils avaient des caractères complémentaires. George était l’âme de la fête, constamment au centre des attentions et éternel célibataire. Ira en revanche prisait la compagnie réduite et les loisirs plus calme. De plus Ira était marié.
A cause de l’amitié qui liait les deux frères ils se conseillaient volontiers sur leurs oeuvres respectives et ce qui devait arriver, arriva ! George demanda de l’aide pour les paroles de A Dangerous Maid à Ira et la suite est celle que nous connaissons : le duo iconique était né.
Il aurait sans doute duré plus longtemps, mais la mort prématurée de George à 38 ans mit une fin à cette collaboration. Love is here to stay, était la chanson sur laquelle les deux frères travaillaient à ce moment et qu’Ira a du finir seul. Probablement que l’écriture lui permit d’exprimer sa peine.
It’s very clear, our love is here to stay
Not for a year, but ever and a day*
(*c’est très clair, notre amour est là pour durer, pas pour un an mais pour toujours plus un jour) Love is here to stay – The goldwyn follies
Les oeuvres iconiques du duo Gershwin
Je ne ferai pas une liste exhaustive, ce serait bien trop long. Je te rappelle que George et Ira étaient de gros bosseurs ! Mais j’ai gardé les oeuvres les plus marquantes pour te les présenter juste ci-dessous.
Lady be good (1924)
Lady be good a la particularité de marquer la première collaboration entre les frères Gershwins et le frère et la soeur, Astaire. Oui oui oui, Astaire comme dans Fred Astaire qui n’aurait sans doute pas eu la carrière remarquable qu’il a eu sans interpréter les oeuvres des Gershwins. Sa soeur, Adele Astaire, danseuse, actrice et chanteuse tout aussi talentueuse fut longtemps sa partenaire et les deux jouèrent bien souvent des rôles de frère et soeur. Bien sûr, les Astaires devinrent aussi un couple assez important dans le paysage de la comédie musicale, mais cela mérite son propre article.
La comédie musicale ne fut pas la plus appréciée mais elle marqua un précédent quand à la collaboration prestigieuse qui se fit et qui laissait présager un succès plus éclatant.
Funny Face (1927)
Nous parlons ici de la comédie musicale live et non du film. Le film s’est inspiré de la première mais l’intrigue diffère beaucoup et les chansons ne sont pas toutes les mêmes. Dans la comédie musicale nous retrouvons les Astaires (avec plaisir !). Et cette fois ci le succès fut largement au rendez vous avec plus de 200 performances en tout à Broadway, avant d’être transféré à Londres ou le succès fut le même. D’ailleurs c’est dans ce show que Fred Astaire a porté pour la première fois son costume et haut de forme qui sont devenus, plus tard, sa marque de fabrique. Entrecoupé de courtes pauses, ce show a été joué jusqu’en 1929.
Aujourd’hui on se rappelle surtout de Funny Face, le film sorti en 1957 qui n’est pas à négliger. Mais si toutes les chansons sont bien des frères Gershwin elles ne furent pas toutes composées pour ce film. Ceci dit, on peut apprécier Audrey Hepburn, qui chante pour la première fois dans une comédie musicale et qui est en tête d’affiche avec Fred Astaire !
Un Américain à Paris (1951)
Alors, rendons à César ce qui est à César, toute la musique de ce film musical n’est pas des Gershwins. A vrai dire, les chansons et musiques composées par les deux frères existaient déjà avant l’arrivée du film (George était mort en 1937). Mais le numéro final est un moment de ballet de 16 minutes sur la musique An American in Paris qui a finalement donné son titre au film. C’est d’ailleurs lors d’un voyage en Europe que George a trouvé son inspiration pour ce morceau. Ce qui n’empêcha pas une nouvelle collaboration prestigieuse, car dans ce film nous avions Gene Kelly (le gars de Chantons sous la pluie) en tête d’affiche !
De plus le film a raflé six oscars (ouais on surkiffait les comédies musicales à cette période…). Enfin, en 2008, puis en 2014 la comédie musicale fut adaptée à la scène et a été jouée jusqu’en 2016 à Broadway.
Porgy and Bess (1935)
George avait deux passions dans la vie, la musique populaire et la musique classique. Il était d’ailleurs un grand fan de Ravel. Et il avait le rêve de créer un opéra. Mais attention hein ! Si quand je parle d’opéra tu t’imagines Mozart et les princes et princesses qui se battent contre les monstres. Avec Porgy and Bess on en est bien loin ! C’est d’ailleurs assez remarquable que George ait choisit un style plus ancien pour l’une de ses intrigues les plus lourdes.
Je m’explique, Porgy and Bess c’est un opéra avec un casting uniquement noir (on est aux Etats Unis dans les années 30 et Martin Luther King n’a que 6 ans je te rappelle…) qui parle de relations toxiques et de drogue. On est loin, mais alors très loin de l’insouciance des trois comédies musicales ci dessus. Et le public n’était pas vraiment prêt…
Même si le show fut joué en tout 124 fois il questionna d’un point de vue musical et d’un point de vue social. Tu le sais maintenant, Gershwin est plutôt connu comme musicien jazz et pas classique. Et dans son opéra il ne renie pas ses racines et les embrasse en mêlant à la fois, musique classique russe, blues, jazz, musique traditionnelle juive et ce que George interprétait comme la musique Africaine Américaine. Et bien entendu quand tu sors des carcans, il y a toujours des « experts » pour s’affoler…
Les « experts » sociaux ont eu également de quoi s’affoler car il s’agissait de la première fois ou il n’y avait que des noirs sur scène. Nous sommes en pleine ségrégation aux Etats Unis et les lois qui régissent ce régime ne seront abolies que trente ans plus tard. Mais la présence d’artistes noirs sur scène a inévitablement posé la question de leur présence dans le public. Ainsi certaines représentation de Porgy and Bess furent pour la première fois ouvertes aux noirs et aux blancs. Ce ne sont que des mini changements. Mais je me demande sincèrement si ces changements ne menèrent pas ultimement aux grands changements.
Tu veux en savoir plus sur Porgy and Bess ? Je t'invite à cliquer ici pour regarder l'excellente vidéo de l'opéra et ses zouz, qui en fait le résumé (c'est un peu comme ma chaîne youtube mais pour l'opéra... c'est trop bien !).
On en a pas fini avec les Gershwins… mais peut être qu’on a oublié le duo iconique
Comme les grands compositeurs classiques, George est passé à la postérité. Ira quand à lui reste celui qui humblement a su mettre des mots sur les traits de génie de son petit frère. A la mort de ce dernier, il stoppa sa carrière pour quelques années. Mais heureusement pour nous il reprit la plume et collabora avec d’autres grands nom de Broadway comme Kurt Weil ou Jerome Kern.
Aujourd’hui les « sonorités Gershwin » nous rappellent un passé, mais comme toute oeuvre intemporelle elles sont régulièrement réinterprétées.
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